La Tunisie : un sympathique petit pays
Pour notre "villégiature" hiver-2014, nous avons choisi la Tunisie. Nous avions initialement prévu d'y passer tout l'hivernage à Monastir avec Balthazar. Notre mésaventure avec les autorités turques nous a fait réfléchir et finalement nous avons préféré la Sicile... Vraiment sans regrets a posteriori car pour avoir visité la côte tunisienne, le paysage marin est bien terne et hors saison les marinas sont désertées et tristounettes. Très peu de bateaux sont habités et on est loin de l'animation des pontons de Licata. Nous avons donc pris le ferry Palerme-Tunis, puis loué une voiture pour sillonner le pays pendant 3 semaines.
Lorsque nous arrivons à Tunis, c'est un grand jour, le jour de la signature de la nouvelle constitution.
Nous sommes en 2014, la révolution date de Janvier 2011. L'assemblée constituante (constituée en 2011) avait un an pour rédiger cette constitution, elle s'est perdue en palabres pendant 3 ans. Ses membres se sont finalement bougé les fesses pour pondre un texte, témoins de ce qui s'est passé en Egypte quelques semaines auparavant : le président Morsi, élu, passé à la trappe, potentiellement condamné à mort pour incompétence et/ou immobilisme et/ou islamisation rampante. Il fallait donc marquer le coup, pour ne pas glisser sur la même pente savonneuse... La presse et instances internationales sont unanimes pour saluer ce résultat, la Tunisie comme modèle de démocratie pour les révolutions arabes... Cela devrait donc être un jour de joie et de fierté nationale en principe, mais la lecture des journaux tunisiens en Français nous permet de voir que ce n'est pas si simple et que ce n'est pas gagné....
Après cette étape importante, un nouveau gouvernement provisoire a encore été mis en place, en attendant l'élection présidentielle qui devrait avoir lieu dans un an. La presse présente les CV des ministres. Edifiant : il s'agit quasi en totalité de personnes hyper diplomées, formées en France (ENA, polytechnique, doctorat de ceci et de cela, sans expérience de la politique). Il est de bon ton de leur faire crédit et de leur souhaiter bonne chance, mais on sent que la confiance n'y est pas. Déjà un nouvelle commission est créée pour délimiter les prérogatives du gouvernement provisoire et les règles de la future élection. Les effets de la révolution se font attendre. Ca n'avance pas. Les problèmes non résolus s'accumulent. "Avant, il y avait corruption au sommet de l'état, maintenant c'est corruption à tous les étages". Beaucoup de déception et de commentaires désabusés pour le commun des mortels, le avant/après la révolution ne semble pas avoir changé grand chose. Nous suivrons les actualités de ce pays avec intérêt.
La situation touristique est catastrophique, en particuliers les touristes français ne viennent plus. C'est bien dommage car la visite ne manque pas de points forts. C'est une surprise de découvrir le nord montagneux si humide et verdoyant, avec ses lagunes et forêts de pin. Lorsque l'on descend vers le sud, on passe donc de cette verdure luxuriante à l'aridité du désert, en voyant petit à petit la végétation se raréfier et se dessécher. Nous nous sommes arrêtés aux premières dunes de sable, dans la région de Tozeur, une grande oasis en bordure du Chott el-Jerid (une mer intérieure asséchée, grande plaine couverte de sel d'une centaine de km de long, d'une horizontalité absolue, propice aux mirages). Plus au sud, c'est le grand Sahara, paradis des dromadaires. Sur la route, on peut s'arrêter dans plusieurs sites archéogoliques majeurs, principalement romains (Cartage, a disparu, rasée en 150 A. J-C). De nombreux petits musées nous initient à l'art de la mosaique, spécidiquement romain.
Nous avons gardé Djerba pour la fin. Un nom qui faisait réver, un paysage vraiment unique, une ile de sable, parsemée de palmiers, comme une oasis sur la mer. Hélas, à ce stade, il faut aborder le sujet qui fache : le système de ramassage des ordures défaillant, la pollution terrible qui transforme tout le pays en dépotoir et qui défigure tous les paysages. Partout des poubelles qui débordent, des dépots sauvages à la sortie des villages, les sacs et bouteilles en plastique qui s'envolent avec le vent. Tout le paysage, les champs, le désert, les plages sont jonchés de détritus. Ca fait tellement mal au yeux qu'il faut renoncer à se promener dans les palmeraies ou au bord de la mer.... Que faire ? Cela est surtout vrai dans les campagnes ou les villages.
D'une façon générale, le pays semble vivre à 2 vitesses, Tunis et sa banlieue étendue, le grand Tunis, les principales villes, semblent modernes, actives et dynamiques. A l'opposé, dans les régions reculées on vit dans une autre époque : pauvreté, absence d'infrastructure, chomage, jeunes terriblement desoeuvrés, statut des femmes... Nous avons vu une petite vieille chargée comme une mule de fagots, que les hommes regardent passer sans lever le petit doigt. On est frappé partout par la jeunesse de la population et l'importance de l'éducation, le nombre des écoles et des formations professionnelles : 50% des tunisiens ont moins de 25 ans. Etonnant aussi, comme ils ressemblent aux jeunes de chez nous (de partout), avec leur portable, leur allure dégingandée, leur look uniformisé (100% des garcons sont en jean & blouson de cuir noir), leur coupe de cheveux dernier cri bien gominés... Que vont-ils devenir?
Comme pour les grecs, les turcs, il faut aller voir les tunisiens, ne serait-ce que pour neutraliser ce qu'on entend dans "les medias". Ce n'est pas loin, et on a aimé : la communication facile car les gens parlent tous français, les promenades dans les ruelles des médinas, les souks plutot calmes, les mosquées aux domes cannelés, les petits ports de pêche tranquilles. Comme toujours on se régale les yeux de déchiffrer le style typiquement tunisien, de distinguer ses caractéristiques : les formes des portes décorées de clous, des fenêtres à jalousie et moucharabieh d'inspiration andalouse. Le bleu est omniprésent, le bleu tunisien cobalt clair si particulier...