De Brest à Campbeltown
Voici presque 2 mois que nous avons quitté Paris. Nous venons de finir la 1ère partie du voyage : les Iles Hébrides au Nord Ouest de l’écosse. Cette 1ère partie qui devait être en principe la plus délicate de ce voyage s’est vraiment très bien passée. La mer d’Irlande et l’écosse au mois de mai ne sont pas forcément de tout repos mais pour traverser ces contrées en toute sérénité nous avions sorti notre joker : notre ami Jacques qui nous a accompagné sur cette croisière et qui nous a fait bénéficier de sa vaste et précieuse expérience de vieux loup de mer et de bon génie bricoleur. Grace à lui nous avons continué à tester Balthazar un peu dans toutes les conditions : il s’avère beaucoup plus rapide et confortable que Vendredi. Néanmoins nous n’avons pas encore atteint avec Balthazar le même niveau de confiance et d’intimité qu’avec Vendredi.
Départ de Brest
Comme prévu, départ 29 Avril dans la nuit vers 2h du matin pour se présenter à la bonne heure dans le chenal du Four et ses forts courants de marée. Nuit difficile (nuit noire, pluie).
Malgré tous nos efforts au départ pour réparer le chauffage du bateau, pour partir dans les temps, nous avons du finalement partir sans…. Ca se fait… car globalement nous avons eu beaucoup de chance jusqu’à présent avec le temps : pour la remontée en Ecosse depuis Brest en passant par les Iles Scilly et l’est de l’Irlande, nous avons eu beaucoup de vent (mainly « 5 to 6, occasionnaly 7 ») mais toujours à peu près dans la bonne direction. Nous avons progressé en évitant les coups de vents annoncés grâce à la stratégie météo de l’Amiral (une belle performance à souligner).
Passage du rail d’Ouessant sans histoire, arrivée aux iles Scilly la nuit suivante à 1h du matin. Nous mouillons temporairement pour le reste de la nuit en face du port de St Mary‘s avant de nous mettre sur un coffre mis à disposition dans le port le matin quand nous y voyons plus clair (petite précision technique : un coffre correspond à un mouillage fixe, où l’ancre est remplacée par un point fixe au fond, genre dalle en béton, avec une chaine fixée et rattachée à une bouée en surface qu’il faut attraper à partir du bateau et remonter à bord, opération plus ou moins aisée selon les cas. Les coffres sont très présents dans ces régions et sont mis à disposition des visiteurs gratuitement dès qu’on remonte plus au nord, en Ecosse notamment où par contre les pontons se font rares).
Les iles Scilly
Nous avons passé 2 Jours à St Mary’s pendant lesquels nous avons pu assister au « Worldwide GIG Championship 2009 ». Les GIG sont des chaloupes à voiles et rames. A l’époque des bateaux à voile, quand un voilier arrivait à l’entrée de la Manche en vue des iles (et nécessitait donc les services d’un pilote), on mettait les chaloupes à l’eau et la tradition voulait que le plus rapide emporte le contrat. En réalité, ce championnat du monde est donc une spécialité principalement Scillo-Scillonienne avec la participation de quelques clubs du continent. Une ambiance bon enfant pour cette fête sportive avec une centaine de bateaux, des équipes de 8 rameurs ( ou rameuses) de tous âges.
Nous partons ensuite pour l’ile de Tresco, distante de quelques milles où nous mouillons à proximité d’un vieux château et visitons la curiosité de l’ile : son magnifique jardin tropical (L’archipel des Scilly est baigné par le Gulf Stream et bénéficie d’un climat très doux, les jardiniers peuvent donc y faire pousser toutes sortes de plantes ou arbres inattendus : palmiers, fougères arborescentes, plantes grasses, fleurs exotiques…). Le lendemain, nous allons mouiller juste en face au sud de l’ile Bryher où nous voulons tester les capacités de Balthazar à se poser sur le sable (Balthazar est en dériveur intégral, c'est-à-dire que dérives relevées, il peut se poser sur une surface plane). Le test est concluant même s’il pique un peu du nez une fois posé. Belles ballades, le paysage sur ces iles plates est un dédale de rochers et de grandes plages de sable blanc. Ca sent bon les algues.
L’Irlande Dublin
Puis c’est le départ pour le nord. Les conditions de vent sont très favorables même si les vents annoncés sont forts et nous décidons finalement de ne pas nous arrêter au Pays de Galles comme envisagé tout d’abord mais de viser directement Dublin pour progresser rapidement et nous mettre à l’abri d’un coup de vent annoncé. Nous arrivons le soir du 5 mai après 35 heures de navigation à 7 nœuds de moyenne, ce qui est plutôt pas mal. Sur Vendredi, la meilleure moyenne sur 24 heures a été de 6 nœuds.
Nous arrivons à la marina de Dublin vers 9h du soir. Cette marina n’est pas au centre ville comme nous l’avions espéré mais dans le « dockland » le quartier du port ( ferries, gros portes-containers qui font des créneaux sous notre nez) mais nous sommes bien contents de nous amarrer à un ponton car ça souffle.
Notre 1er Irlandais est un noir qui tient le bar du «Yacht-Club » et nous accueille, le 2ème Irlandais est marié à une asiatique. Les choses semblent avoir bien changé depuis notre dernier passage en Irlande (15 ans ???). La ville semble en plein boom, le Dockland est en cours de réhabilitation et se transforme en quartier d’affaires ( un peu comme ce qui a été fait à Londres sur les 20 dernières années). Les vieux hangars à l’abandon sont petit à petit remplacés par des immeubles de bureaux et les building modernes (laids) poussent comme des champignons. Les grandes multinationales (Citi, AIG,…) se sont installées sur le grand canal. Quelques galeries de peinture et quelques bars branchouilles et le tour est joué… Le centre historique lui semble resté provincial, les quartiers pauvres et ouvriers ne sont pas loin, curieux patchwork. La crise a été très rude ici et on la sent bien présente. Les temps sont rudes, money is money, business is business (2€ la douche et 3€ les 10 KW au ponton).
Mais les Irlandais sont sympas, serviables et ils savent prendre le temps. Nous devons faire une petite réparation sur la grand-voile. On nous indique un voilier (Sailmaker) qui travaille dans les soutes d’un vieux bateau rouillé, ca ne s’invente pas. Willie, un vieux monsieur, nous fait cadeau de ses conseils, d’un morceau de tissu, de quelques aiguillées de fil et surtout d’un petit morceau de suif (prélevé sur ungros morceau qu’il a « depuis qu’il est gamin ») tout ca en nous expliquant que « son seul regret est de ne pas pouvoir partir aussi en Norvège, il aimerait bien venir avec nous » : Bon à savoir : Ca existe…. !
Nous restons 2 jours à Dublin, séjour agréable, agrémenté par la visite de la ville, un peu de culturel dans un voyage qui sera avant tout découverte nature (beau musée de peinture, visite de l’atelier de Francis Bacon). Et nous visitons évidemment aussi les chaleureux pubs irlandais.
En route vers l'ecosse
Pendant tout notre séjour, les vents sont plutôt musclés. Les « gale warning » (avis de coups de vent) se succèdent. Le 8 mai une petite fenêtre se présente en cours d’après midi confirmé par les marins locaux ( la météo locale est très fiable) et nous en profitons pour rejoindre un charmant petit port de pêche à Port Oriel, distant de 23 milles où nous nous mettons à couple du seul autre voilier présent. Un premier phoque montre ses moustaches.
Dès le lendemain, les vents s’établissant favorablement au sud, nous partons très tôt (5h30) pour une étape qui doit nous amener en Ecosse, premier objectif de notre périple.
Nous pensons d’abord atterrir à Portpatrick , mais les instructions nautiques nous disant que l’entrée est délicate par forts vents de SW, nous renonçons et poursuivons plus loin jusqu’à Loch Ryan, où nous mouillons vers 21 heures après une long passage dans la baie : encore une belle traversée à la belle moyenne de 7 nœuds.
Le vent est totalement tombé dans la nuit et le lendemain c’est donc au moteur que nous mettons le cap sur Campbeltown à environ 40 milles. Ceci inspire quelques commentaires désobligeants du genre « ici c’est comme la Méditerranée, soit trop de vent soit pas assez », mais ceci est injuste, il faut juste bien choisir les fenêtres météo favorables, grande spécialité de l’Amiral.
Avec Campbeltown, « nous entrons sur les terres du Clan Campbell ». Notre 1er village Ecossais est un petit port de pêche très calme qui semble avoir connu des jours meilleurs à la grande époque de la pêche au Herring et des mines de charbon.
Nous fêtons notre arrivée en Ecosse, avec double ration de whisky pour tout le monde, évidemment.